Bizo
Ça y est les vacances sont finies et les portraits d’Artiste UKA redémarrent pour une 3e saison. L’objectif reste le même, faire découvrir aux lecteurs de France Antilles des artistes de chez nous ou d’ailleurs aux travers d’une interview type et de la description d’une oeuvre par son auteur.
Aujourd’hui nous vous présentons Bizo, jeune artiste Ivoirien, récemment installé dans notre île qui a choisi d’exprimer son art sur du mobilier, apprenant les techniques de capitonnage et adaptant son style aux courbes des canapés plutôt que sur les lignes droites d’un mur.
Pouvez-vous vous présenter à nos lecteurs ?
Je suis Bizo, Graffeur, Artiste-peintre, Rénovateur de mobilier et Spécialiste de Mobilier d’Art. J’ai appris le dessin et la peinture aux beaux-arts d’Abidjan (Côte d’ivoire) à l’âge de 6 ans. Attiré par le Tennis (ancien espoir africain) dès 10 ans, je mets de côté l’art pour y revenir 15 ans après, dans les années 2000, à Lille. J’y découvre le street-art et le graff, j’en tombe immédiatement amoureux et commence à graffer ça et là sur les murs de la métropole Lilloise. Assez rapidement, je prends conscience des possibilités artistiques qu’offrent les bombes aérosol, et décide de mélanger les techniques de graffiti et celles de la peinture artistique, et de m’exprimer sur des toiles.
Après 10 ans passé à vivre cette passion secrètement en parallèle de mon activité professionnelle, je décide, de m’y consacrer pleinement en 2016 ; et de me spécialiser dans la décoration et la rénovation de mobilier,…donner une seconde vie aux meubles en les transformant en oeuvre d’ART.
Quelles sont vos techniques de travail ?
Je peux utiliser plusieurs techniques pour une même oeuvre ou pour la décoration de mobilier : bombe aérosol, peinture acrylique, peinture au doigt, pochoirs. Amoureux du mélange des genres et des contradictions, j’essaie de retranscrire cet attachement dans mes techniques de travail. Si j’ai plusieurs techniques de peinture, j’ai une seule méthode : l’aplat de couches. Je superpose les couches de dessin pour arriver au résultat que je recherche.
Pour la rénovation de mobilier, j’utilise les techniques standards de rembourrage, tapisserie, et capitonnerie.
Quelles sont vos sources d'inspiration ?
Le métissage culturel est l’essence de mon travail : #sharethemix (#partagelemelange). Mes sources d’inspiration sont : le Nouchi (argot ivoirien), le Zouglou abidjanais, le Rap, La Musique Classique, l’Histoire des civilisations, l’Histoire Politique, la Philosophie Adinkra (symboles africains représentant des valeurs ou adages de la vie en communauté). Je m’appuie sur cet éclectisme, fruit de mon vécu, pour concevoir, dessiner et partager un message, une idée, un concept. En tant que fervent défenseur de l’économie de la connaissance (‘la connaissance est la seule denrée qui se multiplie quand elle est échangée/partagée’), j’essaie d’offrir un nouveau regard sur le monde qui nous entoure aux travers de mes créations.
Qu'est ce qu'être un artiste caribéen aujourd'hui ?
Il est difficile de répondre à cette question, car je découvre l’artiste caribéen au fil des jours ; et ce même si j’en fais partie (rires…). Arrivé depuis peu en Guadeloupe, j’ai découvert un archipel qui regorgeait de talents artistique. Je me réjouis d’habiter une île avec un dynamisme culturel comme beaucoup peuvent envier. L’histoire de la Caraïbes, ses cultures, ses sociétés, ses mélanges, sa biodiversité sont autant de richesses, et de sources d’inspirations que l’on retrouve dans le travail des artistes caribéens ; qui pour certains, deviennent des références internationales dans leur domaine (bodypainting, peinture, sculpture). Je dirai donc avec beaucoup d’humilité et de mesure qu’être un artiste caribéen, c’est être un artiste appartenant à un vivier de créateurs d’avenir, talentueux, inspirants et porte drapeau des richesses de la ‘Caraïbénité’.
Commentez nous l’oeuvre choisie pour illustrer cet article
J’ai choisi de vous présenter une de mes premières créations de mobilier :’Si tu dors, pour toi s’en va.’ C’est une des œuvres qui m’a conforté dans mon choix de me spécialiser dans la rénovation et la décoration de mobilier. Jeune papa, en manque de mobilier, un ami très proche (futur parrain de mon fils) me propose ce fauteuil qu’il s’apprêtait à jeter. En bon fan de récup’, je saute sur l’occasion. Après 6 ans de bons et loyaux service, le fauteuil est très usé et bien taché. Alors que je m’apprête à le jeter à mon tour, une petite voix me dit : « Je t’ai toujours dit de ne jamais jeter les cadeaux » et là ça été le déclic… je me suis dis que j’allais le rénover, lui donner une troisième vie, encore plus longue et plus colorée que les précédentes, et que j’en ferai ma spécialité artistique.
Le thème de décoration était tout trouvé : ‘ Si tu dors, pour toi s’en va’, c’est un proverbe nouchi (argot ivoirien) qui dit que les opportunités ne s’offrent pas à ceux qui se tournent les pouces. J’ai donc décidé d’illustrer la notion de persévérance, d’unité et d’entraide pour saisir les opportunités, tout en prenant garde aux avantages du confort.
Le visage d’Angela Davis sur le dossier du fauteuil montre un exemple de persévérance dans sa lutte pour les droits civiques aux Etats-Unis. Les graffitis, les pochoirs adinkra et les personnages de BD expriment l’unité l’entraide, et le partage afin de saisir les opportunités. Et enfin, le portrait du 45eme président des Etats-Unis sur l’assise pour montrer mon détachement au personnage, mais surtout pour dire qu’il ne faut pas s’asseoir sur les problèmes, les injustices, les aberrations de nos sociétés, il faut se mobiliser, à son échelle, pour les résoudre.
@bizo8019
Venez découvrir BIZO du 5 au 7 octobre au BALL TRAP club de la Madeleine pour l’exposition « VIOLENCE » Info sur birminghart@gmail.com
Toute l’actualité artistique @United_Karibean_Artists